21 novembre 2024

Lycée César Baggio

DES SCIENCES DE L'INGÉNIEUR

Interview de Marie Desabres (Cerema)

"La prépa m’a permis de me rendre compte de la quantité et qualité de travail que j’étais capable de produire avec les bonnes méthodes de travail." - "Le but est de donner le meilleur de soi-même."

Lors de la conférence annuelle des ingénieurs ayant lieu en Décembre, Marie est revenue au lycée Baggio pour témoigner et répondre aux questions de nos étudiants de CPGE. Il a également accepté de répondre à une interview :

  • Classe PSI/PSI* – Promotion 2017
  • Ecole intégrée : ENTPE (Ecole nationale des Travaux Publics de l’Etat)
  • Métier : Ingénieure géotechnicienne, chargée d’étude ouvrages hydrauliques

Pouvez-vous décrire votre métier, et le quotidien qui lui est associé ?

La majeure partie de mon métier consiste à assister des organismes publics ou privés dans la création des documents réglementaires permettant de garantir la sécurité des ouvrages hydrauliques dont ils ont la charge.

En pratique, mes missions peuvent être assez diversifiées : calcul de stabilité d’un barrage par modélisation numérique, visite approfondie de vérification de l’état de digues de canaux (soit plusieurs jours de marche le long des canaux), inspection de galeries de barrage sous eau équipé de détecteur de gaz… La plus grande partie de l’activité reste de l’activité de bureau, principalement pour la réalisation des rapports suivant les visites.

Il y a également toute une partie managériale lié à mon statut d’adjointe de groupe. J’ai parfois à prendre l’intérim du chef de groupe, ce qui m’amène à participer aux comités de direction de mon agence, d’échanger avec mes collègues du groupe (ingénieurs pour la plupart) sur les productions réalisées, leurs objectifs, les problèmes qu’ils ont pus rencontrer et essayer de les résoudre en faisant appel aux personnes compétentes de l’organisme.

Que vous a apporté votre scolarité en classe prépa pour votre métier actuel ?

En ce qui me concerne, la prépa m’a aidée sur deux grands aspects :

Le premier est bien sûr l’aspect des connaissance techniques nécessaires pour aborder les connaissances plus spécifiques vues en école. De la même manière que pour le passage de lycée en prépa, certains domaines étudiés en prépa ne vont pas être approfondis en école, c’est le principe de la spécialisation, mais d’autres ne peuvent pas être abordés sans ce socle de base obtenus en prépa.

Le deuxième concerne la capacité de travail. La prépa m’a permis de me rendre compte de la quantité et qualité de travail que j’étais capable de produire avec les bonnes méthodes de travail. Elle m’a permis de voir ce qui fonctionnait pour moi, ce dont j’avais besoin pour être la plus efficace possible et où étaient mes limites.

Au cours d’une carrière, ces éléments sont très importants pour pouvoir travailler seul ou en groupe et estimer au mieux les méthodes et outils nécessaires pour atteindre un objectif (professionnel ou personnel d’ailleurs) souhaité.

Pouvez-vous décrire votre parcours professionnel depuis votre diplôme (éventuellement depuis le choix de vos stages) ?

A l’ENTPE, 3 stages sont réalisés. Pour beaucoup, les stages sont la première interaction réelle avec le milieu professionnel. Ils sont organisés de telle manière que le premier stage corresponde à une mise en situation dans une position d’exécutant (dit, « stage ouvrier »), le deuxième dans une position plus proche de celle de l’ingénieur et le troisième en préparation à la prise de poste avec la réalisation d’un travail de fin d’étude, inscrit dans un projet et pouvant avoir des applications très concrètes.

En ce qui me concerne, j’ai très vite été intéressée par la possibilité de faire un stage à l’étranger, via un accord de l’ENTPE avec le Ministères des affaires étrangères, qui envoie tous les ans des stagiaires en ambassade. J’ai effectué un stage de 2 mois à l’ambassade de France à Berlin. Même si mes missions actuelles sont éloignées de ce que j’ai pu y faire, l’expérience fut très enrichissante. J’y ai appris à me débrouiller dans un pays étranger pendant plusieurs mois, à gérer les difficultés de gestion d’équipe et à appréhender l’importance de la communication entre collègues.

Pour mon deuxième stage, et ayant choisi la spécialisation Génie civil/géotechnique, je voulais faire l’expérience d’être sur chantier. Au cours d’un forum organisé par l’école, j’ai trouvé une entreprise privée spécialisée dans la réalisation de fondations profondes qui a accepté de me prendre en stage. J’ai ainsi passé 5 mois sur chantier (un chantier du Grand Paris et un chantier sur les pistes de l’aéroport Roissy Charles de Gaulle) à me familiariser avec cet environnement si différent de ce que j’avais pu connaitre précédemment.

Mon troisième stage a été effectué en bureau d’étude spécialisé dans les ouvrages portuaires (quai, ports de plaisance, etc…) pendant lequel j’ai effectué un travail de fin d’étude sur la mise en œuvre de matériaux recyclés pour la création d’un quai au sein d’une base militaire.

Après ce dernier stage, j’ai rejoint le poste pour lequel j’avais été choisie au sein de l’agence du Cerema à Autun en tant que chef d’unité. Je faisais partie d’une unité de techniciens et techniciens supérieurs chargés d’études pour des problématiques géotechniques au sens large : chute de blocs depuis des parois rocheuses, glissement de terrain et ouvrages en remblais de type barrages et digues. Suite à une réorganisation des services en 2021, mon poste est devenu celui d’adjointe d’un groupe d’environ dix à onze techniciens et ingénieurs.

Un conseil pour nos étudiants de CPGE ?

La prépa est un marathon. Le but est de donner le meilleur de soi-même, mais surtout de tenir le coup sur la longueur. Les efforts fournis en prépa ne sont jamais perdus, même pas l’année de cube, car ils permettent d’avoir un parcours pouvant faire gagner de nombreuses années d’avancement professionnel.

Quand on a la tête dans le guidon et qu’on a l’impression de rater des choses importantes parce qu’on est en prépa, cet objectif peut sembler lointain, mais il ne l’est vraiment pas. Vous vous remercierez d’avoir eu le courage de continuer.

Quels sont les avantages / inconvénients du statut de fonctionnaire durant ses études en école d’ingénieur ?

Entrer à l’ENTPE en tant que fonctionnaire était pour moi d’abord l’assurance de pouvoir finir mes études dans les meilleures conditions. Le fait d’avoir un salaire tous les mois permet vraiment de s’extraire une épine du pied et de pouvoir être autonome. En plus du salaire, il y a également la sécurité de l’emploi (ce que j’ai pu d’autant plus apprécier durant la période Covid) et les avantages qui en découlent quand il s’agit de louer un appartement ou de démarcher une banque pour faire un emprunt, par exemple. En ce qui concerne mon parcours, j’ai eu très peu d’entretiens d’embauche (2) à effectuer pour trouver mon poste, ce qui représente également moins de stress.

En ce qui concerne les inconvénients, il s’agit de la contraposé de ce qui est dit précédemment. J’ai eu la chance d’obtenir un poste que j’apprécie beaucoup, mais certains étudiants fonctionnaires de dernière année se retrouve à choisir par défaut dans la liste des postes à pourvoir. Il y a aussi l’engagement : à l’entrée à l’ENTPE, l’étudiant fonctionnaire s’engage à devoir 8 ans au service de l’état après sa sortie d’école. Ainsi, à moins de rembourser la « dette équivalente » (plus de 100 000€), l’étudiant devra travailler pour la fonction publique. Enfin, la fonction publique ne présente pas autant de choix que le secteur privé. En ce qui me concerne, le travail sur chantier et à l’étranger sont des aspects du travail de géotechnicienne qui m’intéressent et que j’aurais souhaité avoir en début de carrière, mais qui ne sont pas vraiment réalisables dans le secteur public.